Vous avez décidé de faire appel à un interprète professionnel

Quel est son rôle ?

L’interprète est un intermédiaire qui va permettre la communication entre deux ou plusieurs personnes. Il n’est pas là pour aider, expliquer ou juger. Il n’exerce, en aucune manière, une fonction d’assistant social, de psychologue ou de pédagogue.

L’interprète respecte un code de déontologie stipulant, entre autres, qu’il ne révèle rien au sujet du contenu de l’interprétation. Il est tenu au secret professionnel. Et qu’il ne laisse pas paraître son avis ou ses sentiments. Il a un devoir de neutralité. Et encore, qu’il n’ajoute rien et n’enlève rien au sens de ce qui est dit. Il doit rester fidèle au message.

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L’interprète transmet le sens du message sans traduire mot à mot. Vous pouvez donc observer un décalage entre son discours et le vôtre car il a besoin d’une idée complète pour pouvoir la transmettre.

Les traducteurs doivent aussi remplir ces mêmes obligations déontologiques.

Comment puis-je réserver un interprète ?

En faisant appel à un service d’interprétation, ou directement auprès d’un interprète indépendant. Il est conseillé de faire appel à l’interprète dès que la date et l’heure de la prestation demandée sont convenues.

En raison de la pénurie d’interprètes, très peu d’interprètes sont disponibles pour les prestations demandées. Il est donc conseillé de prévoir la date et l’heure de l’événement qui devra être interprété, sous réserve de disponibilité d’un ou de plusieurs interprètes ou de s’y prendre largement à l’avance pour que le service ou l’interprète puisse le bloquer dans son agenda.

Qui va payer l’interprétation ?

Tout dépend du type d’organisme que vous représentez.

  • Les personnes sourdes/malentendantes ont droit à un certain forfait d’heures d’interprétation gratuites et subventionnées par les régions, et ce chaque année. Ce forfait est de 30 heures, renouvelables maximum trois fois sur un an et demi, en région bruxelloise. Il est de 40 heures, renouvelable une fois, par an, et moyennant une cotisation au service de 40 euros par an, en région wallonne.

Avec ces forfaits, les personnes sourdes peuvent faire appel à l’interprétation in situ, à distance ou  à l’interprétation par téléphone, qui se fait en fait, par centre relais visiophonie.

Cependant, ces heures sont largement insuffisantes pour couvrir la totalité de leurs besoins, surtout si on prend en compte les besoins professionnels ou scolaires.

  • Pour les besoins scolaires, il s’agit d’un processus de financement spécifique qui est pris en charge soit par l’INAMI, soit par les régions et qui est très conditionné et qui n’octroie qu’un certain nombre d’heure, souvent  insuffisant pour couvrir la totalité d’un cursus scolaire ou universitaire. Dans ce sens, la Belgique est en infraction au regard des droits édictés dans la convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées et qu’elle s’est engagée à appliquer dans son pays.
  • Pour les besoins professionnels, cela se décide au cas par cas. D’un côté, si l’interprétation est occasionnelle, l’employeur peut demander à la personne d’utiliser son forfait annuel. Si l’interprétation n’est pas occasionnelle, si elle devient un besoin récurrent ou si elle est au cœur de l’aménagement nécessaire au poste de travail, la prise en charge de son coût doit être pensée autrement. Elle est encore souvent problématique dans la mesure où, il faut que les régions en supportent le coût, que ce soit indirectement par l’octroi de primes de compensation versées à l’employeur, ou que ce soit directement par l’octroi d’aides à l’aménagement du poste de travail. L’employeur peut également négocier une solution forfaitaire avec un service d’interprétation.

A partir du moment où l’interprétation fait partie d’un aménagement structurel, visant à rendre un lieu ou un événement accessible, les coûts qui y sont liés doivent être pris en compte dès le début de la mise en œuvre du projet. Ils doivent donc être supportés, soit par une subvention spécifique, que ce soit auprès d’un service spécifique au handicap ou d’un autre service qui intervient pour la mise en place du projet global. Soit par d’autres financements.

En règle générale, les personnes sourdes sont plus enclines à utiliser leur forfait d’heures d’interprétation dans le cadre d’interprétations privées plutôt que collectives, ou en relation avec des personnes privées, des professions libérales, de petits indépendants ou de petites sociétés. Les organisations qui sont concernées par l’application de la convention de l’ONU relative aux droits des personnes handicapées, doivent envisager de se rendre accessibles.

Que dois-je transmettre à l’interprète avant le rendez-vous ?

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  • Toutes les informations de contexte.

S’agit-il d’un rendez-vous chez le médecin ? D’une visite guidée ? D’une réunion professionnelle ? D’une pièce de théâtre ou d’un concert ? D’une réunion de famille ? D’autre chose et quoi ?

  • La date précise, l’heure et le lieu précis de la prestation.

Et ce, en fournissant toutes les indications nécessaires pour qu’il trouve facilement le lieu. Si c’est un bâtiment, renseignez aussi éventuellement l’étage et/ou le nom de la salle, par exemple. S’il risque d’être surpris par des travaux dans votre rue, faites-le-lui savoir.

  • Tous les documents

Ceux de présentation ou de la rencontre qui devra avoir lieu (ordre du jour, textes, procès-verbaux des réunions précédentes, graphiques qui seront présentés,..), et ce dans les meilleurs délais.

Bien que ce soit souvent difficile d’avoir tous les documents en question à l’avance, l’interprète a pourtant besoin de ces documents pour bien saisir le contexte de la rencontre et en saisir plus facilement les nuances. Cela lui permettra d’être plus précis et réactif dans son travail d’interprétation. Dans l’idéal le service d’interprétation ou l’interprète que vous avez sollicité vous indique quel est son dernier délai de réception des documents.

Dans la plupart des cas, il est recommandé de s’assurer de la présence de l’interprète de dix à quinze minutes avant le début de la prestation. Cela permet à la fois à l’interprète de pouvoir poser des questions pour pouvoir prendre des renseignements complémentaires, et de pouvoir s’habituer à la façon de parler ou de signer des personnes qu’il faudra interpréter. Et à la fois, cela permet au commanditaire et à l’interprète de se ménager une marge temporelle en cas de contretemps, sur le trajet par exemple.

Qu’est-ce qui est effectivement couvert par le coût de l’interprétation ?

Le temps de préparation est compris dans le coût de la prestation. Mais le coût ne se calcule que pour le moment effectif de l’interprétation. Si l’interprétation dure deux heures, le coût sera de deux heures, plus les éventuels frais de déplacement.

Sauf si l’interprète est appelé pour rester en service « au cas où on aurait besoin de lui/d’elle », dans ce cas, il faut rémunérer le temps creux. Par exemple si on demande à un interprète d’être disponible toute une journée sur le lieu d’une foire pour le cas où il y aurait un visiteur sourd, il faut alors rémunérer l’interprète toute la journée même si elle ne fait rien.

Il faut prévoir, si l’interprétation dure plus d’une heure, une pause de plus ou moins 10 minutes toutes les heures. Ces pauses sont rémunérées et font partie du temps qui compte comme du temps effectif d’interprétation. Généralement, si l’interprétation dure plus de deux heures ou si elle ne prévoit aucun temps de pause, il est de coutume de prévoir deux interprètes qui se relaient l’un l’autre. Il faut alors payer chaque interprète pour le temps complet de la prestation. L’interprète qui n’interprète pas, reste actif et assiste son collègue.

Comment dois-je m’exprimer en présence d’un interprète ?

Vous devez vous adresser à la personne sourde/votre public, pas à l’interprète. Si vous êtes une personne sourde, vous devez vous adresser à la personne entendante/votre public.

Une fois la prestation débutée, tout ce que vous dites sera interprété. C’est à chacun de veiller à ne pas mettre l’interprète en situation délicate en lui adressant des commentaires au lieu de communiquer directement avec l’interlocuteur.

Si l’un des bénéficiaires de l’interprétation s’exprime sur un domaine très spécifique (médecine, justice, …), il doit veiller à rendre son discours accessible aux autres personnes car l’interprète ne le fera pas à sa place. L’inverse est aussi possible : l’interprète ne relèvera pas le niveau de langue ou de vocabulaire d’un bénéficiaire.

Attention, lorsque l’interprétation dure toute une journée, les temps de pause et de repas prévus pour tout le monde ne sont pas des temps de travail pour l’interprète. Ils doivent lui permettre de se reposer. Si vous avez besoin d’être interprété pendant ces moments-là, il faut en informer le service ou l’interprète à l’introduction de votre demande.

Du point de vue de l’aménagement des lieux ou du matériel, que dois-je prévoir ?

De façon générale, l’interprète prend toujours place à côté de la personne entendante. L’interprète ne doit pas être à contre-jour, mal éclairé ou de façon générale dans un endroit qui fatiguerait ou compliquerait la bonne vue de la ou des personnes sourdes. Attention aux arrière-plans/murs,… qui peuvent aussi perturber la bonne visibilité.  

Il faut aussi veiller à la bonne acoustique du lieu et éviter toute pollution sonore. Pour les personnes sourdes/malentendantes, ce n’est pas vraiment important dans le cas où elles profitent d’un interprète mais ça l’est pour l’interprète et pour le public qui reçoit l’information en langue orale. Ce détail est souvent oublié par les organisations de personnes sourdes !

Si des vidéos ou des diaporamas sont proposés durant l’interprétation, il est nécessaire que l’interprète les visionne avant car certains documents ne sont pas traduisibles sans préparation, surtout si l’interprète, face au public, ne voit pas l’écran qui se trouve dans son dos. Attention, interpréter une vidéo en direct est extrêmement difficile pour un interprète, même le plus professionnel. Choisissez plutôt de les sous-titrer ou de les faire traduire à l’avance.

Lors de conférences, séminaires et formations, il y a quelques points d’attention à prendre en compte. Souvent, l’interprétation se fait d’une langue à l’autre et inversement, pour reprendre l’exemple : soit du français à la LSFB et de la LSFB au français, et ce tôt ou tard, car même s’il y a des conférenciers qui  ne s’expriment qu’en français, il peut y avoir du public signant qui pose des questions, et l’inverse est aussi possible. Donc, l’interprète sera tantôt amené à s’exprimer en français, tantôt à s’exprimer en LSFB.

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L'interprète interprète vers la langue des signes (il est debout)
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L'interprète interprète vers le français (elle est assise).
  • S’il doit s’exprimer en français, il doit disposer d’un siège au premier rang, face aux orateurs s’exprimant en LSFB. Il doit être isolé du public par au moins une place vide de part et d’autre.
  • Il doit disposer d’un micro.
  • Il est préférable qu’il dispose d’une petite table et d’un éclairage adapté.
  • S’il s’exprime face au public, il doit disposer d’un retour son et image.
  • Il faut garder à l’esprit qu’il est difficile pour une personne sourde de suivre simultanément l’interprétation en langue des signes et un document écrit ou visuel.
  • Il faut prévoir un temps un peu plus long que pour un exposé non interprété.
  • Il est nécessaire d’avertir l’orateur de la présence d’un interprète lors de son intervention.


Lors de réunions :

  • L’interprète a besoin de savoir qui va intervenir, de connaître leur nom ou leur signe, leur titre et leur fonction.
  • Un animateur ou un médiateur de réunion sera indispensable pour assurer une gestion rigoureuse de la prise de parole ou de signe. Cela peut être l’un des participants à la réunion qui remplit ce rôle.